L’OCDE épingle la France sur l’intégration des immigrés
Pauvreté, chômage, discriminations… la France figure parmi les mauvais élèves de l’OCDE en terme d’intégration de ses immigrés, selon une étude publiée ce lundi.
Plus de pauvreté et de chômage : la France figure parmi les mauvais élèves en terme d’intégration de ses immigrés, selon une étude de l’Organisation de développement et de coopération économique publiée ce lundi qui compare pour la première fois la situation des étrangers installés dans ses pays membres.
Avec 11% de sa population née à l’étranger, la France se situe dans la moyenne des pays de l’OCDE, qui abritent 110 millions d’immigrés soit 9% de leur population, selon cette étude. Mais le taux de pauvreté des étrangers installés en France est de 21,1% contre 17,3% en moyenne pour les immigrés de l’OCDE.
Et leur taux de chômage était de 14,5% en 2010 contre 11,9% en moyenne dans l’OCDE. Plus grave, les inégalités sont plus marquées dans l’Hexagone : le taux de pauvreté des immigrés y est quatre fois celui de la population majoritaire, alors que ce rapport n’est que de un sur deux en moyenne dans l’OCDE.
Les Pays-Bas et la Belgique ne font guère mieux, mais la France se distingue sur un autre critère : la concentration des étrangers dans les zones très urbanisées. Dans l’ensemble de l’OCDE, 60% des immigrés vivent dans ces zones, contre 44% de la population globale. L’écart est le plus fort en Autriche et en France, où 70,9% des étrangers habitent en ville.
Pour les auteurs de l’étude, le succès des descendants d’immigrés « constitue bien souvent la référence de toute intégration réussie de leurs parents ». Là encore, la France ne brille guère. Leur taux de chômage est de 15,6% en France contre 13,8% en moyenne dans l’OCDE.
Maintien dans la clandestinité
L’OCDE ne livre aucun facteur explicatif des différences entre pays, mais note que les flux sont différents. « La France est le pays qui accueille la plus forte part d’individus nés en Afrique parmi ses immigrés. Les trois quarts d’entre eux (y compris les rapatriés) sont nés dans les pays du Maghreb », soulignent ses auteurs.
Certes, le Royaume-Uni a accueilli un bon nombre d’Indiens plus qualifiés, et les Etats-Unis des Mexicains moins pauvres. Mais « il ne faut pas s’en tenir aux origines géographiques », estime Catherine Wihtol de Wenden, spécialiste des flux migratoires.
Pour elle, « la question du statut juridique des immigrés est fondamental. » « Si on maintient des années des gens dans la clandestinité, on ne peut pas s’attendre à une bonne intégration », souligne-t-elle, en saluant les efforts des pays d’Europe du Sud qui ont régularisé massivement ces dernières années.
A l’inverse, le gouvernement français vient d’édicter de nouvelles règles de régularisation en excluant de sortir un grand nombre de sans-papiers de la clandestinité. « On est beaucoup moins regardant sur la question des discriminations que dans d’autres pays européens », notamment dans les pays scandinaves, a ajouté la directrice de recherche au CNRS.
D’ailleurs, selon l’étude de l’OCDE, la France est en quatrième position sur le sentiment de discrimination (après la Grèce, l’Autriche et les Pays-Bas). Et un test qualitatif, rapporté dans l’étude, confirme l’existence de filtres à l’embauche. « Des postulants originaires d’un pays d’Afrique subsaharienne ont dû écrire quatre fois plus de lettres de candidature que les postulants d’origine française pour obtenir un entretien. La discrimination s’est avérée moins prononcée en Belgique, au Canada et en Suède », relèvent les auteurs de l’étude.
Premières victimes de la crise
La crise économique a frappé plus durement les immigrés que les populations autochtones, surtout dans les pays en première ligne comme l’Irlande, l’Espagne ou l’Italie, selon l’étude. Dans ces pays, qui avaient enregistré récemment une forte immigration de travail, « les immigrés ont été touchés de façon disproportionnée par le chômage ».
« Cela tient en partie au fait qu’ils sont surreprésentés dans les secteurs durement frappés par la crise et dans les groupes les plus vulnérables sur le marché du travail, tels que les jeunes et les personnes peu instruites », selon l’OCDE.
Mais les étrangers installés dans d’autres pays de l’OCDE n’ont pas été épargnés. Au total, le taux de chômage moyen des immigrés est monté à 11,9% en 2010, avec une progression sur dix ans (+2,7 points) beaucoup plus rapide que pour la population autochtone (+1 point). Sur la même période, la crise a poussé les habitants des pays les plus pauvres vers les 34 pays de l’OCDE. En dix ans, le nombre d’étrangers installés dans l’OCDE a augmenté d’un tiers pour passer à 110 millions, soit 9% de la population totale, précisent les auteurs de l’étude.
« Première comparaison menée dans l’ensemble des pays de l’OCDE », ce rapport salue l’Allemagne, le Danemark, la Finlande et la Suède qui ont malgré la crise « déployé de nombreux efforts pour intégrer les immigrés sur le marché du travail ces dernières années ».
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