L’écotaxe, ou tout ce qui va mal dans notre fiscalité
Comme le rappelle le Monde, en 2008, l’écotaxe avait été adoptée dans un relatif consensus politique. Mais aujourd’hui, après plusieurs reports dans son application, elle est remise en question, y compris par ceux qui l’avaient souhaitée. Il faut dire qu’à la base, cette taxe est assez monstrueuse.
Ubu créé une nouvelle taxe
Quand on prend du recul, cette écotaxe, imaginée par l’UMP et mise en place par le PS, apparaît comme un monstre de complexité. L’objectif est de taxer les camions pour leur pollution et le dommage fait aux routes sans péage et utiliser cet argent pour le transport ferroviaire. Déjà, affecter la recette d’une taxe à une dépense précise me semble contestable. Cette taxe pèse 1,2 milliard, mais elle est complexe à mettre en place. Il faut définir les routes concernées, comment comptabiliser les kilomètres réalisés et qui sera chargé de la collecter. Un vrai cauchemar administratif, illustré par le fait que si le gouvernement l’abandonnait, il y aurait un dédit d’un milliard pour la société qui fait la collecte !
Quelques régions ont obtenu des ristournes (Bretagne, Aquitaine, Midi-Pyrénées), renforçant la complexité du système et posant la question légitime de sa justice. Pourquoi le Languedoc-Roussillon n’en a-t-il pas ? Mieux, sachant que la France consomme plus de 70 milliards de litres de pétrole, dont 40 de gazole, cela signifie qu’une simple hausse de la TIPP sur le gazole de 3 centimes aurait rapporté le même montant sans générer une telle complexité. N’aurait-il pas été plus simple de faire de la sorte ? Et en conclusion, pour être acceptée, la fiscalité écologique doit venir en subsitution d’autres taxes et pas en addition, étant donné qu’en trois ans, pas moins de 84 nouvelles taxes ont été mises en place.
Le besoin d’une fiscalité verte reste là
Bien sûr, mettre en place une fiscalité qui pousse à des comportements plus respectueux de nos ressources naturelles est un objectif plus que souhaitable. Je persiste à être favorable à une taxe carbone, autant pour essayer de limiter l’impact des activités de l’homme sur la planète que parce qu’il est essentiel de pousser nos économies à moins consommer de matières premières non renouvelables. Il me semble qu’il va de l’intérêt de notre pays (pauvre en matières premières), et de l’humanité, que d’adopter un comportement beaucoup plus frugal, notamment pour les hydrocarbures.
Et cela passe par leur renchérissement. Mais cela doit être fait de manière juste, simple et anticipable. La fiscalité écologique doit venir en substitution d’autres taxes, en s’assurant que les ménages modestes fortement consommateurs auront un certain temps et seront aidés pour s’adapter, afin de garantir son acceptation. Il faudraot aussi une taxation simple, que tout le monde comprend et devant laquelle tout le monde serait égal (au contraire de la fiscalité pétrolière). Enfin, l’Etat devrait donner de la visibilité à long terme pour permettre à l’ensembled e l’économie de s’adapter.
C’est pour cela que je suis favorable à une taxe carbone, qui porterait sur tous les hydrocarbures (fuel et kérosène notamment, aujourd’hui largement exonérés pour de mauvaises raisons), tout en ne pénalisant pas les entreprises françaises. Cette taxe doit être progressive dans le temps, à savoir que l’Etat annonce à l’avance ce qu’elle sera dans les prochaines années, pour pousser les acteurs économiques à investir pour réduire leur consommation. Le marché de droit à polluer était une idée théoriquement intéressante mais qui est pratiquement un échec du fait des excès des marchés.
Bref, l’écotaxe est une mauvaise taxe. Elle a rendement dérisoire pour une complexité maximale. Elle a déjà des régimes spéciaux qui la rendent injustes. De facto, c’est juste une énième taxe de plus alors qu’il faudrait revoir en profondeur notre système fiscal, comme Piketty et Landais le soutenaient.
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