
POLEMIQUE
Il est l’un des plus proches collaborateurs de François Hollande, celui qui a son bureau juste à côté de celui du chef de l’Etat. Dans l’organigramme de l’Elysée, Aquilino Morelle est le conseiller politique et chef du pôle communication au cabinet président de la République.
C’est à ce titre qu’il est l’objet d’une longue enquête du site Mediapart (lien réservé aux abonnés), publiée ce jeudi 17 avril. Intitulée « Elysée: les folies du conseiller de François Hollande », elle mélange révélations sur les liens entre ce médecin et l’industrie pharmaceutique et anecdotes sur son comportement.
Chauffeur, chaussures et cireur
Le site d’investigation explique notamment qu’Aquilino Morelle a demandé -et obtenu- que « ses deux chauffeurs personnels ne soient pas versés au pool commun ». En conséquence, ils seraient à sa disposition 24h sur 24. « Le mardi en fin d’après-midi, comme nous avons pu le vérifier, un des deux chauffeurs véhicule son fils pour des activités personnelles dans le XVe arrondissement », écrit le journaliste Michaël Hajdenberg.
Il épingle aussi la passion du conseiller pour les chaussures de luxe. « Il a 30 paires de souliers de luxe faites sur-mesure, pour son pied qui a une forme particulière. Des Davison, des Weston… des chaussures de plein cuir toujours du même style », explique ainsi David Ysebaert, l’homme qui cire les chaussures d’Aquilino Morelle.
Ce qui choque Mediapart, c’est la façon dont à deux reprises, il a convié son cireur à l’Elysée. « Aquilino Morelle a même fait privatiser un salon de l’hôtel Marigny afin de se faire cirer les chaussures seul au milieu de cette pièce toute en dorures », raconte le journaliste. Autant d’allégations qui font mauvais genre, alors que François Hollande vante la République irréprochable, mais qui semblent ne pas devoir connaître de suites.
Quels liens avec les labos pharmaceutiques?
Un autre volet de l’enquête pourrait en revanche avoir le plus de conséquences, peut-être sur le terrain juridique. Le site évoque de possibles conflits d’intérêt du temps où Aquilino Morelle travaillait à l’Igas, le grand corps de l’Etat qui supervise les politiques sanitaires et sociales. Nous sommes en 2007 et celui qui n’est pas encore conseiller de François Hollande participe à l’écriture d’un rapport sur l’encadrement des programmes d’accompagnement des patients associés à un traitement médicamenteux, financés par les entreprises pharmaceutiques ».
Problème, il est rémunéré en parallèle par un laboratoire, le groupe Danois Lundbeck. Confirmation d’Aquilino Morelle qui explique à Mediapart l’avoir fait dans les limites autorisées par la loi. « En tant que fonctionnaire, un certain nombre d’activités annexes sont autorisées, dont l’enseignement et le conseil », explique-t-il ajoutant que « ces activités ont dû être déclarées à l’Igas. »
Mediapart explique pourtant ne pas avoir retrouvé trace d’une telle autorisation; la seule que la direction de l’Igas a fourni au site étant une déclaration pour donner des cours à la Sorbonne. Un ancien patron de l’institution estime que « ces deux fonctions sont incompatibles. On n’autorise jamais un inspecteur à travailler pour une entreprise privée. Alors un laboratoire pharmaceutique… ».
S’il était effectivement prouvé qu’il n’avait pas eu de dérogation, le code pénal assimile cette double activité à une prise illégale d’intérêt: un délit passible à l’époque de cinq ans de prison de 7500 euros d’amende.
La réponse d’Aquilino Morelle
Pour le principal intéressé qui a répondu par mail à Mediapart, ces « affirmations dénuées de tout fondement, visent uniquement à (le) salir ». Selon le Lab d’Europe 1, Aquilino Morelle pourra se défendre devant les journalistes dans quelques jours. Un déjeuner avec la presse présidentielle est organisé le 7 mai.
Mais avant cela, il a posté « un droit de réponse » sur son compte Facebook. Il y confirme avoir « accepté le contrat ponctuel avec le laboratoire Lündbeck (15 octobre / 31 décembre 2007). Ce fut le second et dernier contrat de cette activité de conseil. Ces activités ont dû être déclarées à l’IGAS. Je n’ai pas retrouvé la trace de cette démarche en dépit de mes recherches. » Ce qui ne manquera pas de relancer les soupçons, même si on peut rappeler qu’en droit la charge de la preuve incombe à l’accusation.
Aquilino Morelle assure par ailleurs qu’en 2010, quand il a coordonné l’enquête sur le Mediator, il n’avait « aucun lien avec aucune entreprise quelle qu’elle soit et, en particulier, aucun lien avec aucun laboratoire pharmaceutique ». « A aucun moment je n’ai donc été en situation de conflit d’intérêts », ajoute-t-il.
http://www.huffingtonpost.fr/2014/04/17/aquilino-morelle-conseiller-hollande-enquete-mediapart_n_5165285.html?utm_hp_ref=mostpopular