Les fonctionnaires sont des privilégiés: que faut-il penser de ces cinq idées reçues?
Ils ont choisi la grève pour fêter les deux années de François Hollande à l’Elysée. Tous les syndicats -contrairement au rassemblement du 1er mai- appelaient en effet les fonctionnaires à descendre dans la rue ce jeudi 15 mai pour protester contre la politique d’austérité de la majorité.
Constatant « que le gouvernement demeure sourd à leurs exigences en matière de salaires et d’emploi public », sept syndicats (CFDT, CFTC, CGT, FA-FP, FSU, Solidaires et Unsa) ont lancé un appel commun aux plus de 5 millions d’agents pour qu’ils se mobilisent « massivement ». FO les a aussi appelés de son côté à cesser le travail.
Et les fonctionnaires de l’Hexagone se sont mobilisés avec des cortèges plutôt fournis, pour dire qu’il « faut que cesse » le gel de leurs salaires, bloqués depuis 2010. En début d’après-midi, Jean-Marc Canon (CGT, premier syndicat de fonctionnaires) a assuré que la mobilisation était « très importante ».
Selon le sondage Yougov pour iTélé et le HuffPost, cette manifestation est soutenue par une petite moitié des Français. Peut-être la conséquence de clichés persistants. Sont-ils pour autant pertinents?
Il n’ y a jamais eu autant de fonctionnaires en France
Durant son quinquennat, Nicolas Sarkozy avait instaurée la RGPP pour révision générale des politiques publiques dont l’un des piliers était le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. D’où la réduction de 150.000 du nombre de postes dans la fonction publique d’Etat. A son arrivée à l’Elysée, François Hollande a mis fin à cette règle, lui substituant la Map pour modernisation de l’action publique.
L’actuel gouvernement entend maintenir les effectifs d’ici à 2017, les créations de postes dans les domaines de l’éducation, la police et la justice devant être compensés par des coupes dans d’autres ministères.
Mais tous comptes faits, l’Insee a récemment fait savoir que fin 2012, près de 5,5 millions de Français travaillaient dans la fonction publique. Sur un an, cela représente une hausse de 0,3% car la baisse de 1% dans la fonction publique d’Etat n’est pas compensée par une hausse de 1,6% dans la Territoriale et de 0,7% dans l’Hospitalière.
La France est le pays le plus administré d’Europe
C’est une certitude, il y a en France beaucoup d’emplois publics si l’on compare avec d’autres pays développés. Les dernières statistiques publiées par l’OCDE remontent à 2011 et portent sur des chiffres de 2008. Cette année là, on comptait 21,9% d’emplois publics dans l’Hexagone. C’est nettement plus que la moyenne des 32 pays étudiés (15%).
La France comptait un taux deux fois supérieur à l’Allemagne (9,6%) et largement supérieur à celui des Etats-Unis (14,6%). Mais les pays nordiques ont des taux supérieurs, la Norvège frôlant même les 30%.
La fonction publique c’est l’emploi à vie
La remise en cause du statut des fonctionnaires n’est pas à l’ordre du jour. L’emploi garanti à vie reste bien la norme dans la fonction publique. Mais ce n’est pas le cas pour tous.
Environ 17% des effectifs, soit 900.000 personnes, sont en effet composés de non-titulaires qui ont, comme dans le secteur privé, signé des CDD ou des CDI. Néanmoins, contrairement au secteur privé où la durée totale des contrats précaires ne peut légalement pas excéder 18 mois, ils peuvent s’étirer sur six ans dans le privé.
Le gel du point d’indice est compensé par les primes
L’un des principaux moteurs de la contestation est la décision du gouvernement de geler le point d’indice (qui sert de base au calcul du salaire des fonctionnaires) jusqu’en 2017. Ce point qui n’a pas bougé depuis juillet 2010 (4,63 euros) est multiplié par l’indice de traitement de chaque fonctionnaire qui varie de 300 à 800 selon le grade de celui-ci. En conséquence de quoi, le traitement ne peut être inférieur aux 1445 euros du Smic. S’il s’agit de la majeure partie de la rémunération du fonctionnaire, ce n’est pas la seule. En 2011, environ 20% était constitué de primes et autres indemnités qui varient fortement selon les personnes.
Mais la hausse éventuelle de ces primes n’a pas compensé l’inflation et la hausse des cotisations retraites. Selon l’Insee, les agents de la fonction publique d’Etat ont perdu 0,8% de pouvoir d’achat en 2012 par rapport à 2011. Leurs collègues de la Territoriale ont perdu 0,5% et ceux de l’Hospitalière, 0,6%.
Selon la Fondation Ifrap (Institut français pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques), ils ne sont pourtant pas à plaindre. En 2013, la directrice Agnès Verdier-Molinié affirmait à Challenges que « depuis 2007, en euros constants, les agents de l’Etat ont été augmentés de 3%, tandis que les salariés du privé ont perdu près de 1% de leur pouvoir d’achat ».
Les professeurs sont les mieux lotis
Publié début mai, le bilan social du ministère de l’Education 2012-2013 évoque une rémunération moyenne pour les enseignants s’établissant à 2470 euros. C’est, à 20 euros près, le même salaire moyen que dans le secteur privé et à 10 euros près, le même que dans le reste de la fonction publique d’Etat.
Mais selon l’OCDE, « les enseignants français du primaire et du secondaire ont des salaires statutaires nettement inférieurs à la moyenne de pays de l’OCDE et aux salaires des autres diplômés du supérieur… ». En début de carrière, la France se situe 25e sur 36. Et malgré un rattrapage qui s’opère au fil de la carrière, les instituteurs finissent leur carrière à la 16e place.
http://www.huffingtonpost.fr/2014/05/15/fonctionnaires-privilegies-que-faut-il-penser-idees-recues_n_5321400.html?utm_hp_ref=economie