Y’en a marre de l’absentéisme de nos députés européens
Posté par ippolito le 29 mai 2014
Européennes : à Strasbourg, les députés français brillent souvent par leur absence
Le manque d’intérêt de certains de nos élus pour le Parlement européen contribue à l’euroscepticisme ambiant. Explications.
Strasbourg et Bruxelles sont-elles trop éloignées pour nos députés européens ?
Il faut croire que oui, puisque les Français n’y brillent pas par leur présence. Selon VoteWatch, un site internet comptabilisant l’activité des parlementaires européens en fonction de leur participation aux votes, ils n’assistent qu’à 83,3 % des sessions plénières. Ce qui les classe de facto à la 21e place – sur 28 – en termes d’assiduité. Les députés autrichiens, slovaques et luxembourgeois forment le trio de tête avec peu ou prou 90 % de participation.
Pourtant, il serait trop facile de placer tous les députés dans le même panier. Certains d’entre eux ne comptent pas leurs heures, mais d’autres sont plus connus pour leurs absences répétées. Avant de faire son entrée dans le gouvernement de Manuel Valls, Harlem Désir n’assistait par exemple qu’à 50,15 % des sessions plénières. Un taux record qui lui a ouvert en toute logique les portes du secrétariat d’État aux Affaires européennes…
Coïncidence ou non, 50 % de participation aux plénières est le minimum requis pour empocher les 4 243 euros d’indemnité annuelle de voyage versés aux parlementaires. Auxquels s’ajoutent : 8 020,53 euros de salaire brut mensuel, une indemnité là encore mensuelle de 4 300 euros pour les frais généraux et 304 euros par jour de présence au Parlement. Bref, pour faire simple, un député à l’assiduité minimale touche un peu plus de 10 000 euros net par mois !
Mélenchon, peu présent mais bavard
« Les députés européens français ne sont pas plus absents que les autres », tempère Olivier Rozenberg, professeur associé au Centre d’études européennes de Sciences po. Mais il reconnaît que certains profitent du Parlement européen comme d’un « oasis lors de leur traversée du désert ». Quant aux chefs de parti, à l’image de Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon, ils semblent surtout absorbés par leur rôle national. Avec 71,40 % de présence aux sessions plénières, Mélenchon se classe à la 698e place (sur 766) des députés les plus actifs, toujours selon VoteWatch.
Oui, mais le président du Parti du gauche a plus d’un tour dans son sac pour fustiger ce classement. Et s’il est difficile de lui décerner un premier prix d’assiduité, il décroche sans conteste la palme des « explications de vote », qui, contrairement au vote lui-même, ne nécessitent pas d’être présent au Parlement.
Sur toute sa mandature, il en a déposé près de 1 100 : un record ! Une performance qui lui permet de figurer parmi les députés européens les plus actifs sur MEP ranking, un site alternatif à VoteWatch. En revanche, il lui sera plus difficile de contester son absentéisme à la commission des Affaires étrangères. Au cours des quarante dernières réunions, il n’a jamais jugé bon de faire le déplacement.
Marine Le Pen, éternelle absente des commissions
Marine Le Pen est elle aussi connue pour ne jamais avoir mis les pieds à la commission de l’Emploi et des Affaires sociales. Ce que confirme Pervenche Berès, député européenne PS de la circonscription Ile-de-France et présidente de ladite commission : « Je ne l’ai jamais vue. Les députés européens ne sont pas tous des mauvais élèves, mais les pires, c’est elle et son père. »
Marine Le Pen n’honore pas souvent l’hémicycle de sa présence (voir infographie). À sa décharge, n’étant membre d’aucun groupe parlementaire, la présidente du FN voit ses possibilités d’actions limitées. « Comme nous n’avons pas le droit de présenter des amendements en session plénière, le travail que nous pourrions faire en commission parlementaire ne sert à rien », se justifie Ludovic de Danne, conseiller aux Affaires européennes du FN.
Une situation qui pourrait changer à l’issue des élections du 25 mai. En tête dans de nombreux sondages, le FN pourrait rafler plusieurs sièges et constituer un groupe parlementaire avec d’autres députés d’extrême droite. « En cas de victoire, nous pourrons avoir accès aux rapports que nous amenderons à tel point que nous les modifierons et les inverserons. Et surtout, nous proposerons autre chose que ce que prémâchent la Commission européenne et les super-fonctionnaires à ses ordres ! » promet Ludovic de Danne. Reste à savoir si la présidente du FN préférera – cette fois-ci – honorer son mandat européen plutôt que de mener sa prochaine campagne présidentielle.
Pervenche Berès, la bonne élève
Tous les députés ne sont pourtant pas de mauvais élèves. Pervenche Berès n’est pas la députée la plus présente en session plénière, mais elle a rédigé onze rapports durant son mandat, soit neuf de plus que la moyenne française. Elle insiste sur l’importance d’une participation assidue pour « transformer les choses » en « étant présent et en négociant ». En témoigne son taux de présence en commission parlementaire (voire infographie). Selon elle, être député européen est un travail de « conviction » mais aussi de concessions.
Européenne convaincue, Pervenche Berès comprend pourtant le scepticisme des citoyens vis-à-vis de Bruxelles : « La première raison, c’est la manière dont les conservateurs ont géré la crise. C’est vrai que l’Europe n’a pas fait ce qu’elle devait, et a fait les choses trop brutalement et trop tard. L’Europe s’est transformée en maison de redressement. » La seconde, selon elle, concerne l’absence de l’Europe dans le quotidien des Français : le sujet ne revenant « qu’une fois tous les 5 ans », les Français l’ont jugé « trop loin, trop technique ». Le Parlement est jugé « flou » pour les électeurs, « compliqué à lire ».
Olivier Rozenberg est lui aussi sévère quant au « manque de résultat des institutions » européennes. Résultat : l’Europe est tenue pour responsable du chômage et de la forte désindustrialisation du territoire national. Dimanche, l’Union européenne risque d’entendre cette défiance des peuples.
RETROUVEZ notre infographie sur la présence des eurodéputés stars du Parlement :
http://www.lepoint.fr/europeennes-2014/europeennes-a-strasbourg-les-deputes-francais-brillent-souvent-par-leur-absence-22-05-2014-1826686_2095.php
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