Y’en a marre de la SNCM
Posté par ippolito le 8 juillet 2014
SNCM : la gabegie incarnée
En grève longue durée, la société de transport maritime ne cesse de s’enferrer, sous le regard lâche des gouvernements successifs.
C’est une fable triste et scandaleuse. Celle d’un gâchis perfusé à l’argent public, pour préserver la paix sociale au prix fort. La Société nationale Corse Méditerranée (SNCM), chargée de relier par la mer le continent à l’île de Beauté, ne pouvait vivre qu’à l’abri du monopole et des subventions plantureuses. Au temps de la concurrence et de la vérité des prix, elle est dépassée.
Et c’est panique à bord. La part de marché de l’entreprise est passée de 80 % en 2000 à 34 % en 2005. Un dévissage brutal qui ne s’est plus inversé. Depuis plus de dix ans, la SNCM n’a pas connu un seul résultat d’exploitation positif. Aujourd’hui, la Commission européenne exige qu’elle rende 450 millions d’euros de subventions. C’est presque risible puisque le chiffre d’affaires annuel n’atteint même pas 300 millions d’euros, aides comprises.
Après avoir fait la sourde oreille, le secrétaire d’État aux Transports Frédéric Cuvillier, bien obligé de se prononcer, milite pour un redressement judiciaire. Aussitôt, les syndicats hurlent. Ils rencontrent ce lundi 7 juillet Gilles Bélier, le médiateur nommé par le gouvernement. Chaque jour de grève pénalise des milliers de passagers et coûte un million d’euros. Ce n’est pas une première. À la SNCM, c’est toujours le même scénario qui se répète lamentablement.
Six P-DG en dix ans !
La compagnie a connu six P-DG en dix ans. Presque toujours des hauts fonctionnaires, jamais des entrepreneurs. Leur feuille de route est simple : ne fâcher ni les Corses ni les syndicats, virtuoses de la surenchère.
Depuis le début des années 2000, l’État remet régulièrement au pot en échange d’un plan de redressement qui n’est jamais appliqué. Entre 2001 et 2004, un programme de départ de 300 salariés aboutit au contraire à une légère hausse du personnel navigant. La concurrence emploie deux fois moins de personnel de bord que la SNCM, où la masse salariale représente la moitié du chiffre d’affaires contre le quart ailleurs.
Mais cet amour du sureffectif ne dissuade pas les mouvements sociaux, bien au contraire. Les grèves de 2004 font perdre 200 000 passagers à la compagnie. L’année suivante, les banques prennent peur et refusent de maintenir leur concours. L’État décide de privatiser en remettant quelques louches d’argent public pour allécher un repreneur.
En 2006, 38 % du capital est vendu pour 13 millions d’euros à un fonds d’investissement, BCP. Deux ans plus tard, BPC revend ses parts au prix fort : 73 millions d’euros, une multiplication par plus de cinq pour une société qui va de perte en perte.
L’État, qui a gardé directement 25 % du capital et dispose de trois représentants au conseil d’administration, brille par son mutisme. Rien ne se passe, la flotte vieillit, les subventions ne sont plus ce qu’elles étaient. Chaque ministre des Transports enterre le dossier en espérant qu’il n’explosera pas avant son départ.
En janvier denier, l’État avait promis de rénover la flotte de la SNCM avec quatre nouveaux navires. Mais Transdev, qui est le principal actionnaire avec 66 % – et qui appartient à l’État à 50 % via la Caisse des dépôts -, n’a nullement l’intention de verser plus de 600 millions d’euros dans ce puits sans fond. Les syndicats le savent depuis février, mais ils ont attendu la période de pointe pour bloquer leurs bateaux… en attendant de les couler définitivement.
http://www.lepoint.fr/editos-du-point/sophie-coignard/sncm-la-gabegie-incarnee-07-07-2014-1843870_2134.php
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