Le changement ? c’est tout le temps !
Décidément, avec François Hollande, on va de surprises en surprises.
Lui qui avait martelé « le changement, c’est maintenant », n’arrête pas de changer.
De compagne, on le sait, mais c’est, comme il l’affirme, sa vie privée…
Sauf que ses changements se multiplient dans beaucoup d’autres domaines.
Oublions donc la scabreuse histoire mettant en scène son ex-compagne, humiliée devant la France entière, et mise à la porte assez brutalement…pour découvrir les autres changements. (Mais qui connait le mari d’Angela Merckel ?)
Il était socialiste, s’étant fait élire sur un programme socialiste, propre à séduire la gauche, voire l’extrême gauche, se targuant de renégocier le traité européen, de mettre au banc de la société son ennemi « la finance », en bref s’engageant à faire revenir de l’égalité, de la liberté, de la fraternité dans le paysage français s’il était élu.
Or il n’arrête pas de changer…
Il voulait renégocier le traité européen…il a vite changé d’avis, et s’il a tenté de faire croire le contraire, il a finalement été désavoué par son propre premier ministre.
Il avait affirmé que pour cette renégociation : « j’aurais à en convaincre la chancelière, mais je ne serai pas seul : les chefs de gouvernements, même conservateurs, partagent sans le dire notre position »… on sait maintenant ce qu’il en a été.
Malgré tout, Hollande a tenté de faire croire qu’il avait « rempli son contrat ».
S’il avait affirmé être capable « d’inverser la courbe du chômage », formule géométrique qui, s’il faut en croire le scientifique Etienne Klein, n’a aucun sens, (lien) il reconnait aujourd’hui avoir échoué.
Mais un autre changement est remarquable : pour cette « inversion », il s’était engagé personnellement, utilisant le « je », (je veux inverser la courbe du chômage à la fin de l’année 2013), or, lorsqu’il a évoqué l’échec, il a utilisé le « nous », dégageant ainsi sa propre responsabilité.
« Nous n’avons pas réussi dans l’année 2013 à faire diminuer le chômage… »
Le changement, c’est aussi ça : il n’assume pas son propre échec, préférant en partager la responsabilité avec son gouvernement.
Autre changement, il utilise maintenant le mot « stabilisation », et non « inversion » ce qui n’a évidemment pas le même sens.
Interrogé sur la « Franceafrique », il avait assuré, évoquant son prédécesseur : « j’aurais préféré que, pendant 5 ans, le candidat sortant marque plus de distance à l’égard d’un certain nombre de régimes, dont les comportements étaient tout, sauf incontestables ».
Les interventions militaires décidées au Mali, et en Centrafrique, n’ont pas confirmé cette détermination. lien
Comme l’estime, avec d’autres, Jean-Luc Mélenchon, l’intervention au Mali était à l’évidence liée aux activités nucléaires de la France, via Areva, au Niger, (lien) et si le gouvernement a tenté de mettre ça sur le dos du « terrorisme », il est difficile de ne pas y voir d’autres raisons, plus économiques celles-là, liées aux mines d’uranium qu’Areva exploite pour nos centrales nucléaires.
Il devait fermer Fessenheim dès son investiture, il l’a reporté à la fin de son mandat, et manifestement la « transition énergétique » recule au fur et à mesure que le temps passe.
De plus, les signes qu’il donne de sa volonté de sortir du nucléaire ne sont pas convaincants, c’est le moins qu’on puisse dire, puisqu’il vient de rencontrer le premier ministre britannique, notamment sur la construction de 2 EPR à Hinkley Point.
C’est assez paradoxal, puisque lui, qui semble de plus en plus tenté par le « modèle allemand », n’est manifestement pas pressé de lui emboiter le pas, en matière énergie.
Son ennemi « le monde de la finance » n’est pas trop inquiet.
Lors de sa conférence de presse récente, il a décidé de supprimer 35 milliards de cotisations patronales, ce qui représente, au-delà du cadeau fait aux patrons, une baisse de salaire annuelle de près de 1250 € pour chaque travailleur, dans la continuité des 20 milliards déjà offerts aux patrons grâce au CICE (crédit impôt compétitivité emploi) et s’il faut en croire l’économiste Bertand Martinot : « un allègement de 15 milliards d’euros génèrerait donc un peu moins de 200 000 emplois supplémentaires (…) projections très fragiles qui voleraient en éclat en cas de nouvelles hausses d’impôts (…) difficile à mesurer, au mieux nous pourrons avoir les premières analyses fiables aux alentours de 2020 ».
En résumé, des cadeaux aux entreprises…et des résultats incertains…en 2020.
Mais Pierre Gattaz, le patron des patrons en veut plus : il promet la création d’un million d’emplois à condition d’une baisse de 100 milliards d’euros des charges des entreprises.
Prendre de la main gauche pour le donner à la main droite, en quelque sorte, c’est la nouvelle stratégie de François Hollande.
Et quid de la lutte contre la fraude, l’exil fiscal ?
Des Seychelles à la Suisse, en passant par le Luxembourg, Chypre, 20 pays sont montrés du doigt, considérés comme « non conformes aux standards de l’OCDE en matière d’information à des fins fiscales », (lien) mais comment expliquer alors la décision hollandaise de retirer de cette liste noire Jersey et les Bermudes, décision qui aurait été prise sous l’impulsion de l’industrie financière ?
Le fait que BNP Paribas y possède 8 filiales en serait-il la raison ?
Qui cherche-t-on à protéger ?
Au passage, le gouvernement a été plutôt discret sur certaines annulations de dettes : près de 4 milliards pour la Cote d’Ivoire, (lien) 106 millions pour le Congo (lien)… 10 millions d’euros pour les Comores (lien), sans oublier celle du journal l’Humanité, qui se montait à plus de 4 millions d’euros.
Autre changement : Il voulait faire la guerre à l’impôt, et a multiplié les taxes et les impôts divers…a part l’écotaxe qui a connu un destin assez tragique, les autres impôts sont toujours là, privant toujours plus les français de pouvoir d’achat.
Alors qu’en 2010 les prélèvements obligatoires se montaient à 822 milliards d’euros, ils ont atteint 921 milliards en 2012.
Pour 2014, de nouveaux records devraient être battus, dans la continuité de 2013, puisqu’ils atteindraient les 46,5 % de PIB (produit intérieur brut) soit plus de 985 milliards… ils étaient de 44,9 % fin 2012, et de 46,3 % en 2013.
Nous voilà bien loin du combat annoncé le 22 janvier 2012, il y a plus de 2 ans, au Bourget contre « son ennemi, le monde de la finance »…
De mauvaises langues affirment que la célèbre vignette automobile serait remise à l’ordre du jour… après les municipales, à moins que ce ne soit qu’une bête rumeur, un hoax ?
Le dernier changement en cours est plus inquiétant.
Lui qui se présentait lors du discours du Bourget comme ayant un gros cœur à gauche, le voila d’un coup, au début 2014 s’affirmer haut et fort social libéral, rencontrant en secret celui-là même qui a permis la paupérisation de millions d’allemands, qui sont passé du jour au lendemain de la case « chômage », à la case « misère », obligés d’accepter des salaires défiant toute concurrence, d’environ 400 euros, dans un monde du travail ou la soumission du travailleur est organisée en coupe réglée, lequel se verra privé de tout revenu s’il refuse le travail qu’on lui propose.
Cet homme s’appelle Peter Hartz, des lois du même nom, social libéral aussi, et c’est sous le régime social libéral de Schroeder que ces lois ont été mises en place, avec le résultat que l’on sait.
Après avoir assuré qu’il n’y avait pas eu de rencontre, l’Elysée a finalement admis qu’elle a bel et bien eut lieu entre Hollande et Hartz en novembre 2013, même si le président a juré de ne pas avoir parlé de réforme avec lui.
Ce ne serait donc pas une surprise si un de ces prochains jours, de nouvelles lois, calquées sur celles préconisées par Hartz, soit décidées au plus haut niveau en France : au programme, le travail payé un euro de l’heure, comme le craint Thierry Lepaon, le nouveau patron de la CGT, et la durée d’indemnisation du chômage drastiquement réduite, avec l’obligation d’accepter n’importe quel emploi, sous peine de radiation.
Il avait assuré au sujet des entreprises qui délocalisent « elles devront rembourser les aides qu’elles ont obtenu »…on attend toujours.
Il avait martelé avec conviction lors de son discours du Bourget « le quinquennat ne sera pas un zigzag, une volte face, une contradiction », on sait maintenant à quoi s’en tenir.
Le plus cocasse c’est que les critiques viennent aussi de l’ex-président, lui qui n’a cessé de changer son fusil d’épaule, déplorant déjà en mars 2012, que le programme de son ex-rival socialiste « change tout le temps ». lien
Comme dit mon vieil ami africain : « les chameaux ne rient pas les uns des autres de leurs bosses ».
Olivier Cabanel
http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-changement-c-est-tout-le-temps-147473