Économie française: S&P, croissance, déficit, chômage, taux… Comment se porte le malade ?
Encore une mauvaise nouvelle pour la France, avec une révision à la baisse de la croissance par les services de l’Union européenne. Estimée à 0,1% pour 2013, c’est bien loin des 0,8% sur lesquels le gouvernement se basait, et encore plus éloigné des 1,2% du début du quinquennat.
Mécaniquement, cette nouvelle va devenir une grosse épine dans le pied de l’exécutif. Si l’Etat ne dégage plus autant de richesses que prévu, il faudra faire de nouvelles économies pour rentrer dans le cadre des traités européens. Ou alors expliquer à Bruxelles qu’un délai est nécessaire… Mais tous les indicateurs ne sont pas au rouge cette semaine.
Annoncé en phase terminale il y a un an par le sinistre docteur Standard & Poor’s, le malade France n’avait plus qu’à attendre le dernier sacrement. Elle pouvait ainsi rejoindre la Grèce au cimetière des nations punies par la crise.
Pourtant, les apothicaires du gouvernement semblent, du moins à première vue, avoir réalisé un miracle: l’agence de notation américaine, qui avait été la première à priver l’Hexagone de son triple A, a salué mercredi la volonté de réforme de l’équipe de Jean-Marc Ayrault, « la première fois depuis de nombreuses années. »
S&P a laissé entendre qu’elle pourrait relever la perspective du pays (aujourd’hui négative) si, et seulement si, les réformes engagées portent leurs fruits au niveau de l’emploi et de la réduction du déficit.
Sur la voie de la guérison, la France est donc encouragée à poursuivre ses efforts, avant de pouvoir prétendre à la rédemption. Toutefois, ce n’est que l’avis très prudent du docteur Standard & Poor’s, qui, comme un cardiologue ou un chirurgien, ne s’intéresse qu’à sa spécialité, en l’occurrence la solvabilité générale d’un pays. Peut-on déjà être rassuré, la France est-elle en voie de rémission?
Alors, pour la France, c’est grave docteur? Le diagnostic du HuffPost.
1. Agences de notation : Encore un comprimé matin et soir
Si S&P a redonné du baume au cœur du gouvernement, la perspective n’a pour autant pas été relevée. Et même si tel était le cas, la perspective passerait de « négative » à « stable ». Il faut donc poursuivre les efforts budgétaires pour passer à une perspective « positive », étape sine qua non avant d’espérer recouvrer la note suprême du AAA.
Pour rappel, la note AAA représente le Graal permettant aux pays d’emprunter dans des conditions très favorables pour financer leurs déficits budgétaires.
Pour faire partie de ce club très fermé, il faut être noté AAA par au moins deux des trois principales agences: Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch. Les deux premières ont successivement supprimé ce sésame à la France en 2012…
Que faire pour rattraper le retard ? Réduire les déficits et relancer la compétitivité. Pour le second point, le rapport Gallois a permis de jeter les bases d’un note meilleure, ce que S&P a noté dans son rapport. Pour le premier, il faudra prendre encore quelques consultations (voir 4).
2. Taux : Tout va bien, revenez dans un an !
C’est la bonne nouvelle du check-up français. Malgré une croissance atone et des perspectives embrumées, la France n’a jamais emprunté à des taux aussi faibles. Preuve que les investisseurs conservent toute leur confiance dans les capacités de l’État à rembourser.
« Nous sommes dans la continuité de 2012. La dette française reste une très bonne alternative pour les investisseurs car elle demeure un placement sûr qui offre un certain rendement par rapport aux titres allemands qui eux ne rapportent plus rien », souligne Natixis. Eh oui, pas que des avantages à être le pays le plus solide de la zone euro !
Il faudra toutefois surveiller les prochains mois, car les taux d’emprunt espagnols et italiens se sont fortement détendus dernièrement. Ce nivellement pourrait contraindre la France à ne plus profiter de ces conditions aussi avantageuses…
3. Croissance : Sortir de l’anesthésie générale, et vite
La Commission européenne devrait annoncer de très mauvaises nouvelles vendredi 22 février, avec une révision à la baisse. Selon Le Point, les performances de l’économie française devraient être quasiment à l’arrêt cette année, de l’ordre de 0,1%.
Ce qui pose problème, c’est que le gouvernement a bâti son budget annuel en comptant sur une croissance 0,8%. Conjugué aux 38 milliards d’euros d’économies, ce taux devait ainsi équilibrer les comptes publics à un niveau acceptable pour les instances européennes (voir 4). C’est donc râpé avec une perspective de 0,1%.
Le gouvernement est en proie à une cacophonie sur le sujet. Quand la version officielle maintient l’hypothèse de 0,8%, certaines voix préparent déjà le terrain: le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a concédé que la prévision allait être abaissée, sans doute aux alentours de 0,2% ou 0,3%… C’est bien connu, il vaut mieux consulter plusieurs médecins pour disposer d’un diagnostic complet !
4. Déficit : Et si on passait à la diète sévère ?
Le déficit public, qui illustre une balance négative entre les recettes et les dépenses de l’Etat, est mécaniquement lié à la croissance. Si cette dernière devrait être rabaissée à 0,1% par Bruxelles (voir 3), son déficit va automatiquement se creuser.
La Commission européenne prévoirait un déficit public de 3,6%, soit bien au-dessus des 3% que le gouvernement comptait atteindre. Au-delà de cette limite, la France s’expose à des sanctions, mais Le Monde croit savoir qu’Olli Rehn, le commissaire en charge des affaires économiques et monétaires, préférerait à ce stade accorder un peu plus de temps, afin de ne pas étouffer dans l’œuf une éventuelle reprise.
Gare toutefois à rentrer dans les clous rapidement, car certains voisins comme l’Espagne et les Pays-Bas ont multiplié les efforts, au risque de plonger leur économie dans la récession. Ils pourraient donc s’offusquer d’un régime de faveur, ce qui mettrait un sacré boxon dans la salle d’attente du cabinet médical.
5. Chômage : Le thermomètre tout proche de l’explosion
4,6 millions de personnes pointaient à Pôle emploi fin décembre, dont 3,13 millions sans aucune activité. Sur l’année 2012 entière, cela représente une hausse de 10%… Un chiffre inégalé depuis 15 ans qui pourrait atteindre, d’ici un à trois mois, le record historique de janvier 1997 (3,2 millions).
Au-delà de mesures du candidat Hollande (contrats de génération et emplois d’avenir), c’est l’accord sur l’emploi signé par les partenaires sociaux le 11 janvier qui porte toutes les espérances. Ce que Standard & Poor’s n’a pas manqué de féliciter, tout en relativisant sa portée.
Cette réforme n’aura pas nécessairement un impact fort sur le taux de chômage mais pourrait « inverser » la tendance à la hausse des coûts salariaux en France, indique l’agence de notation. Prochaine étape, les électrochocs.
http://www.huffingtonpost.fr/2013/02/21/economie-francaise-sp-croissance-deficit-chomage-taux_n_2731751.html?utm_hp_ref=france