Les casseroles judiciaires de Nicolas Sarkozy
Bygmalion, Karachi, le financement libyen… le nom de Nicolas Sarkozy est associé à de nombreuses affaires politico-judiciaires. Tour d’horizon des ennuis judiciaires de l’ancien chef d’Etat.
L’ancien avocat passera-t-il de l’autre côté des prétoires? Depuis la fin de son immunité diplomatique, Nicolas Sarkozy a été cité dans plusieurs grands scandales politico-financiers. Dernier en date: l’affaire Bygmalion, du nom de cette boite de com’ qui aurait émis de fausses factures à la demande de l’UMP. Retour sur ces dossiers qui pourraient compliquer le retour de l’ancien président aux plus hautes fonctions.
L’affaire Bygmalion
La boite de com’ Bygmalion -créée par deux proches de Jean-François Copé- aurait fait à la demande de l’UMP des factures pour des meetings ou conventions politiques qui n’ont jamais eu lieu. Ces fausses factures ont pour la plupart été émise lors de la campagne de Nicolas Sarkozy de 2012.
A quoi a donc servi cet argent s’il n’a pas été utilisé dans des meetings? Pour l’heure, deux hypothèses sont avancées: celle d’un enrichissement personnel de Jean-François Copé, ou la création d’une « caisse noire » à son intention, ou bien celle de frais de campagne déguisés pour Nicolas Sarkozy. Son plafond autorisé a en effet été largement dépassé.
Où en est l’enquête? Elle ne fait que commencer. Une enquête préliminaire a été ouverte le 5 mars mais pour l’heure aucune garde à vue ni mise en examen n’a eu lieu. Lundi, Jean-François Copé a porté plainte contre X en tant que président de l’UMP.
Le financement « libyen » de la campagne de 2007
Ce n’est pas la première fois que des soupçons pèsent sur les comptes de campagnes de Nicolas Sarkozy. Depuis avril 2013, les juges Serge Tournaire et René Grouman enquêtent sur un financement illégal de sa campagne de 2007 par l’ancien dictateur libyen Mouammar Kadhafi. Cette aide financière avoisinerait les 50 millions d’euros.
L’affaire a été révélée par Mediapart, qui avait publié en 2011 une note secrète. Celle-ci s’est avérée fausse, mais le sulfureux intermédiaire en armements Ziad Takkiedine affirme détenir des preuves…sans jamais les avoir fourni à la justice.
Où en est l’enquête? Les deux magistrats ont placé sur écoute l’ancien président ainsi que deux de ses anciens ministres de l’Intérieur, Claude Guéant et Brice Hortefeux. Sans obtenir d’informations sur cette enquête. Pour l’heure, les investigations se poursuivent.
L’affaire Bettencourt
Le juge Jean-Michel Gentil cherchait à savoir si Nicolas Sarkozy avait profité du fait que l’héritière de L’Oréal ne disposait plus de la totalité de son jugement pour lui soutirer d’importantes sommes d’argent. Celles-ci auraient notamment servi à financer illégalement sa campagne de 2007, dans des proportions largement supérieures à ce qui est autorisé par la loi.
Où en est l’enquête? Mis en examen pour abus de faiblesse, il a finalement bénéficié d’un non-lieu en octobre 2013. La cour de cassation a validé la quasi-totalité de la procédure en mars dernier: un procès pourront donc s’ouvrir très bientôt.
Trafic d’influence
Mais de cette affaire a accouché d’un nouveau dossier très gênant pour l’ancien chef d’Etat. Les conversations téléphoniques enregistrées dans le cadre de l’affaire libyenne ont révélé que Gilbert Azibert, avocat général près la Cour de cassation, renseigne directement le camp Sarkozy.
En effet, si l’ancien chef de l’Etat a été mis hors de cause, il avait lancé un pourvoi pour invalider la saisie de ses agendas privés et officiels. Pourquoi vouloir à tout prix récupérer ces agendas? Car ils ont leur importance dans l’affaire Tapie (voir ci-dessous).
Les conversations entre Nicolas Sarkozy et son avocat Me Thierry Herzog démontrent que les deux hommes sont particulièrement bien informés sur la procédure judiciaire en cours. Gênant. D’autant qu’en échange de ce service, l’avocat général aurait demandé un coup de pouce de Nicolas Sarkozy pour obtenir un poste de conseiller d’Etat à Monaco (qu’il n’a finalement pas eu).
Où en est l’enquête? Une information judiciaire pour trafic d’influence a été ouverte.
L’affaire Tapie
Dans cette affaire, les juges soupçonnent Nicolas Sarkozy d’avoir eu un rôle décisif dans l’arbitrage particulièrement favorable dont a bénéficié Bernard Tapie dans le contentieux qui l’oppose au Crédit Lyonnais depuis 1993. Au coeur de cette suspicion: le fait que Nicolas Sarkozy a rencontré au moins six fois l’homme d’affaires avant son élections en 2007 et à une douzaine de reprises une fois à l’Elysée. Les agendas privés et officiels de Nicolas Sarkozy en attestent.
Où en est l’enquête? Depuis un an et demi, les mises en examen pleuvent dans cette affaire mais Nicolas Sarkozy n’a jamais été auditionné. L’étau autour de l’ancien chef de l’Etat s’est cependant resserré d’un cran cette semaine: son ancien bras droit, Claude Guéant a été placé en garde à vue.
L’affaire Karachi
Le nom de Nicolas Sarkozy a aussi été évoqué dans le cadre du volet financier de l’enquête sur l’affaire Karachi. Une enquête a été ouverte pour déterminer si l’ancien président s’est rendu complice d’une violation du secret de l’instruction lors de la diffusion d’un communiqué par l’Elysée le 22 septembre 2011.
Ce texte affirmait que « s’agissant de l’affaire dite de Karachi, le nom du chef de l’Etat n’apparaît dans aucun des éléments du dossier ». Des familles de victimes avaient porté plainte pour « violation du secret de l’enquête et de l’instruction », et « violation du secret professionnel ». C’est donc bien en marge du dossier Karachi pour une question de procédure, plus que de fond, que Nicolas Sarkozy est inquiété.
Où en est l’enquête? Les juges ont demandé la saisine de la Cour de justice de la République (CJR) pour enquêter sur l’ancien Premier ministre Edouard Balladur et son ministre de la Défense, François Léotard. Leur position sur Nicolas Sarkozy, alors ministre du Budget et porte-parole de campagne d’Edouard Balladur, est plus floue: « il appartient à la CJR d’entendre Nicolas Sarkozy comme témoin assisté, en qualité de ministre du Budget », écrivent-ils. Autrement dit, les juges ne disent pas que la CJR est obligée de l’entendre.
Les sondages de l’Elysée
Dans un rapport publié en 2009, la Cour des comptes a épinglé la présidence de la République sur plusieurs sondages commandés par l’Elysée. Non seulement ces derniers n’ont pas été faits à la suite d’un appel d’offre, mais ils ne concernaient pas seulement la perception de l’action du chef de l’Etat. Un sondage portait par exemple sur la grossesse de Rachida Dati, un autre sur son mariage avec Carla Bruni ou sur les candidats probables du PS à la présidentielle.
Où en est l’enquête? Une enquête préliminaire a été ouverte après une plainte de l’association de lutte contre la corruption Anticor pour délit de « favoritisme » (car il n’y a pas eu d’appel d’offres) et « détournement de fonds » dans l’affaire des sondages de l’Elysée. Si cette plainte a été déposée « contre X », elle vise en réalité indirectement Nicolas Sarkozy et son entourage.
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